• Numéro zéro


             

    Titre : Numéro zéro

    Auteur : Umberto Eco

    Première parution : 2015

    Édition lue : Grasset

    SYNOPSIS

     « En 1992, à Milan, un groupe de journalistes, cinq hommes et une jeune femme, sont embauchés pour créer un nouveau quotidien qu’on leur promet dédié à la recherche de la vérité, mais qui se révèle un pur instrument de calomnie et de chantage.
    Ils fouillent dans le passé pour mettre en page leur « numéro zéro », et c’est le présent qui leur saute au visage…
    « L’ombre de Mussolini, donné pour mort, domine tous les événements italiens depuis 1945 » : est-ce là le délire d’un journaliste d’investigation paranoïaque ? Mais alors, pourquoi le retrouve-t-on assassiné un beau matin ?
    Attentats, tentatives de coups d’État, empoisonnements, complots, stratégie de la manipulation, de la désinformation et de la tension : quand tout est vrai, où est le faux ?
    Umberto Eco nous offre ici la tragédie burlesque de notre temps. »

     

    Umberto Eco, né le 5 janvier 1932 à Alexandrie dans le Piémont (Italie), est un universitaire, érudit et romancier italien. Reconnu pour ses nombreux essais universitaires sur la sémiotique, l’esthétique médiévale, la communication de masse, la linguistique et la philosophie, il est surtout connu du grand public pour ses œuvres romanesques.

    « Les derniers sont toujours les plus désespérés. »

    Un roman qui dénonce la manipulation, la corruption, l'obscurité de l'information et de la désinformation. C'est un monde nouveau qui s'ouvre au lecteur : celui qui se veut vrai et que l'on découvre totalement surfait, faux. Un jeu pour les journalistes qui s'attellent à construire un numéro 0 d'un journal commandité en imaginant de l'information.

    « Les perdants, comme les autodidactes, ont toujours des connaissances plus vastes que les gagnants, pour gagner il faut savoir une seule chose et ne pas perdre son temps à les connaître toutes. Le plaisir de l’érudition est réservé aux perdants. Plus quelqu’un sait de choses, plus elles lui sont allées de travers. »

    On y apprend beaucoup de choses assez techniques dans un premier temps, ce qui m'a assez amusé : le narrateur, Colonna, est l'expert du groupe, il guide les autres, leur explique la marche à suivre... pour berner tout et n'importe quoi. C'est une facette presque ludique mais qui se veut bien entendu dénonciatrice. C'est une critique, en somme, une ouverture sur une ombre méconnue, sur notre propre béatitude, notre crédulité, notre naïveté.

    « La vie est supportable, il suffit de se contenter de ce qu’on a. »

    J'ai trouvé beaucoup de longueurs, lesquelles furent très lourdes, des pages entières sur des faits historiques d'une grande précision : ce sont des élucubrations, des hypothèses alambiquées sur l'Italie fasciste, le Vatican de la Seconde guerre Mondiale. En somme, peu de faits qui fassent écho pour nous, Français, et je pense que le texte aurait dû être retravaillé au moment de la traduction, en ce sens, pour l'édition française. C'est en effet très gênant, ennuyeux et peu utile lorsque l'on n'est pas, à la base, incollable sur les noms, les dates, les événements. La thèse en elle-même — dont je préserve le suspense — est certes intéressante, mais parle peu, du moins ici, en France, et propulse ainsi d'énormes latences sur le récit qui pourtant était prometteur. Surtout quand on sait que peu de romans d'Umberto Eco ont été traduits en français.

    « Les autistes sont renfermés sur eux-mêmes, ils ne communiquent pas. »

    On a également une esquisse d'un portrait d'autisme dont on ne sait jamais où il veut nous mener. Beaucoup d'éléments sans réel dénouement pour leur donner un sens précis à écrire, à dire, à raconter, à retenir surtout. Une déception, donc. Si le fond m'a plu, la forme m'a déplu et je m'attendais à bien mieux de la part de ce grand monsieur.

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  • La ronde de nuit


             

    Titre : La ronde de nuit

    Auteur : Patrick Modiano

    Première parution : 1969

    Édition lue : Folio

    SYNOPSIS

     « Comment devenir traître, comment ne pas l'être ? C'est la question que se pose le héros du récit qui travaille en même temps pour la Gestapo française et pour un réseau de résistance. Cette quête angoissée le conduit au martyre, seule échappatoire possible.


    Par ce livre étonnant, tendre et cruel, Modiano tente d'exorciser le passé qu'il n'a pas vécu. Il réveille les morts et les entraîne au son d'une musique haletante, dans la plus fantastique ronde de nuit. »

     

    Patrick Modiano, né le 30 juillet 1945 à Boulogne-Billancourt, est un écrivain français, auteur d’une trentaine de romans primés par de nombreux prix prestigieux parmi lesquels le Grand prix du roman de l'Académie française et le prix Goncourt. Il obtient le Prix Nobel de Littérature le 9 octobre 2014. La ronde de nuit est son deuxième roman, paru aux éditions Gallimard en 69.

    Un récit qui, au premier abord, paraît obscur. Une flopée de noms, dont on ne sait justement s'il s'agit bien de noms ou de pseudonymes, d'actions, de descriptions de cette ronde de nuit, de cette parade diabolique qui jette sur l'œuvre toute entière des draps d'horreur. Une ambiance malsaine, donc, pour une réflexion candide d'un narrateur qui se sait découpé, qui se veut oublié, qui s'oublie.

    « D'un naturel méfiant, j'ai l'habitude de considérer les gens et les choses par leur mauvais côté pour ne pas être pris au dépourvu. »

    J'ai d'abord été assez réfractaire à ce monde dont les portes m'étaient laissées fermées. Je n'accrochais pas à l'écriture. Puis, par petites parcelles, les portes se sont ouvertes, et je suis entré dans le récit, dans cette atmosphère d'occupation horriblement pesante, et qui en même temps s'affranchit totalement de ses contours pour adopter une forme faussement joyeuse : la musique, la danse, les rires, les banalités, les routines, les visages qui se dessinent peu à peu dans l'esprit du lecteur comme dans celui du narrateur. La joie d'une extrême minorité, et une joie terrible, morbide, celle d'un groupe de crapules en tous genres qui tirent parti de l'épouvante française.

    « On ne peut suivre les hommes. »

    J'ai apprécié la retranscription du doute, de la mélancolie, du malheur de l'Occupation. Je ne sais si apprécier est réellement le verbe à employer ; tout du moins ai-je été happé par cette histoire dès après y être entré. C'est une vision que j'adore, celle du cynisme, de l'ironie. On a un tableau d'une période sombre de l'histoire que tout le monde connaît — compris ceux qui la nient — d'une part, et d'un microcosme extrêmement particulier, que l'on a tendance à oublier, d'autre part : celui du charlatanisme, de la cruauté, d'une filière mafieuse, dirais-je, du collaborationnisme. Est exprimé un point de vue de la résistance qui m'a semblé fébrile, sans grands moyens si l'on compare à ceux des collaborateurs, et surtout sans jamais évoquer l'extérieur. On se sent prisonnier en France, mais pis encore : à Paris, mais pis encore : dans le cœur du narrateur. Un narrateur sans nom. Sans histoire digne d'être racontée. Seul.

    « Depuis mon enfance, j'ai promis tant de choses que je n'ai pas tenues, fixé tant de rendez-vous auxquels je ne suis pas allé, qu'il me semblait "enfantin" de devenir un traître exemplaire. »

    Un très bon roman, dont la brièveté seule m'est apparue hypocrite — ayant mis un temps à rentrer dedans, tout de même. On s'en délecte, vraiment.

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