• Thomas Clerc — Intérieur

    Intérieur


             

    Titre : Intérieur

    Auteur : Thomas Clerc

    Première parution : 05/09/2013 (rentrée littéraire).

    Édition lue : L'arbalète/Gallimard

    SYNOPSIS

     « Comme j'ai été lent à faire le tour de ma maison ! 3 ans pourtant c'est 3 fois moins qu'Ulysse revenant de Troie. Ulysse ne voulait pas rentrer à Ithaque, et moi je m'évertue à rester ici, je supplie de ne pas sortir. »

    L'appartement de Thomas Clerc fait 50 mètres carrés. Il y vit depuis 10 ans. Il y passe la majeure partie de son temps. Sans doute parce qu'il est un homme d'intérieur, il a entrepris d'en faire le tour intégral avec cette espèce de vertige qui le pousse toujours à épuiser la totalité d'un espace.

     

    Thomas Clerc est un romancier et essayiste français né à Neuilly-sur-Seine en 1965. Il est agrégé de lettres modernes, docteur ès lettres et maître de conférences au sein de l'université Paris Ouest Nanterre La Défense.

    J'ai donc enfin terminé le roman introspectif, si ébruité, de Thomas Clerc. Ce fut un fiasco total, et je vais doucement vous expliquer pourquoi. J'ai à l'origine fait l'achat de ce livre parce qu'il m'enchantait, je m'étais beaucoup renseigné à son sujet et le volet — je me dis maintenant : commercial — de "littérature expérimentale" introspective, perçant par une visite guidée profonde et originale d'un appartement, l'idée d'y trouver des plans, des morceaux de pensées en toute simplicité me ravissait à l'avance.

    « Merde au joli
    Minimaliste en ce domaine, je ne possède aucun dévidoir-papier de plastique ou de bois que l'on fixe au mur, et où il n'est pas rare de voir se manifester les tendances que je viens de mentionner (fleurs de céramique, pin peint, désodorisant, rouleau fantaisie, etc.). »

    C'était sans compter sur cette couverture dont, à mon sens, l'auteur est très loin d'être digne. De la littérature expérimentale ? Tout ce que j'ai pu y trouver d'original, c'est la forme même du texte. Quant au reste : métamorphose horripilante des déterminants "un" et "une" en "1", faisant peut-être allusion à une liste perpétuelle, une sorte de philosophie qui ne donne le sourire qu'à celui qui la comprend tout à fait — autrement dit, l'auteur — et qui, surtout, oblige les yeux à s'y habituer (les miens n'y sont arrivés qu'à la page cent il me semble) ; jeux de mots de très mauvais goût — quelques uns parsemés à divers endroits et j'aurais au contraire été enchanté et aurais eu certainement l'envie d'en rire, et ce bien qu'il n'y ait rien de drôle ; mais c'est un horrible festival tout le long du livre.

    « Macérer
    Le bain, on le voit, est l'occasion pour moi contemplatif de me livrer aux rêveries, sentiments et ressentiments, élucubrations diverses, théories avortées, ressassement de phrases sonores, souvenirs, projets, essais de phrases, pensées ou obsessions dérivant d'une macération calme de tout mon être. »

    J'ouvre au hasard pour faire la démonstration : je tombe sur une partie de "la cuisine" nommée "allumer le feu". C'est d'un pompeux ! D'ailleurs, il explique lui-même qu'il n'a fait que s'inspirer des auteurs tels que Poe qui ont déjà fait le tour de leur appartement... Alors qu'y a-t-il d'expérimental du moins de nouveau ? — Je suis du reste clément, me semble-t-il, de ne viser que le "nouveau" tandis que je tends d'ordinaire à privilégier la lecture du "notablement nouveau", voire l'original dans l'original... Je pense monter un peu haut alors que ce livre m'a laissé un peu bien, et c'est le moins que je puisse dire.

    « Sans philosophie de l'ameublement, je ne vois pas où réside l'intérêt de l'intérieur. » 

    L'écriture n'a rien de transcendent, avec ses expressions répétitives telles que "eu égard" ou "ainsi de". J'ai eu l'impression qu'une grande partie de l'ouvrage visait simplement à prouver que l'auteur reçoit régulièrement des femmes dans son appartement, ou qu'il vit bien à Paris. Des conclusions limitées, un certain enfermement — mais que pouvais-je attendre de plus de la peinture d'un espace réduit ? Je me demande dans quelle mesure l'auteur, au vu de sa profession, peut assumer pleinement ce qu'il a publié. Je suppose qu'une partie de ses élèves a lu, lit ou lira Intérieur, dans lequel on trouve en outre une localisation des endroits où il, disons, "répond à ses besoins"... Ce doit être une gêne conséquente et quotidienne. Peut-être était-ce là la vocation de ces écrits, je ne le sais pas.

    « Le travail austère de l'écriture implique d'incessants subterfuges. Internet y pourvoit mais redouble le problème de la dépendance à l'écran. Le frigidaire est un 1 allié plus onctueux, mais piégeant. Le thé calme. Les toilettes servent. La fenêtre délasse. La sieste tente. Le téléphone divertit. La télé concentre. Le sexe vide. La rue agresse. Rien ne vaut 1 bon tour de maison. »

    J'ai lu que se trouvaient cachées entre les lignes d'Intérieur des "emprunts de phrases", notamment de chez Marguerite Duras, et n'ai pas été étonné d'être totalement passé à côté — il fut des instants, et des instants assez fréquents, il faut le dire, où je décrochais totalement la lecture, où je lisais sans penser à ce que je lisais, parce que cela ne m'intéressait pas, ne me captivait pas. Le livre me tombait littéralement des mains, c'était une horreur ; je me suis battu jusqu'au bout. En bref : bravo Gallimard !... Une si belle édition, de surcroît... Ah ! je regrette. Oh ! comme je regrette !

    « Sortir de chez moi, on s'en apercevra au terme de ce livre, je l'ai mérité. »

    Qui sait toutefois ? Peut-être le relirai-je dans quelques décennies — il faudrait en effet que je l'aie entièrement effacé de ma mémoire pour m'y aventurer à nouveau —, en serai-je subjugué, tout comme la majorité des lecteurs de ce livre qui m'aura décidément bien aidé à dormir... et en ce sens, je le remercie.

     

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