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    Série Beckett

     Comme la photo de très bonne qualité du dessus le prouve, j'ai accès à un grand nombre — si ce n'est à la totalité — des ouvrages de Samuel Beckett, auteur que j'apprécie beaucoup tout en l'ayant peu lu. Aujourd'hui, là, maintenant, en ta présence, je te propose quelque chose, toi qui me lis si gentiment (merci). Tu veux que j'essaie de formuler ? O.K., attends, j'essaie.

         

    C'est l'été, il fait chaud, c'est la canicule, buvez de l'eau-appelez vos proches-ne faites pas d'effort-mangez léger-dormez-ne vivez plus-mais respirez, bla bla bla. L'ennui est assez élevé, lui aussi. Mais je ne compte aucunement tuer le temps, le temps ne m'ayant rien fait et l'homicide n'étant pas de mes attributions principales. Le temps, j'aimerais le chérir, et pour cela, il n'y a pas trente-six solutions : je dois lire. J'ai beaucoup de critiques à te poster, aussi, parce que j'ai plein de jolis livres que j'ai lus et qui attendent d'être rangés, mais je suis un surhomme, tu sais, alors je peux faire autre chose en parallèle.

    Donc. Je te propose, toi qui me lis toujours (enfin j'espère), de te faire une série Beckett. Ce n'est pas bien compliqué : je lis tout ce que je peux de Beckett, tout en préservant mon rythme de lecture normal (voire en l'accélérant, si tu es gentil avec moi), et je t'en fais part dans cette rubrique créée spécialement à l'occasion.

    Je ne procèderai pas comme d'habitude, les livres seront classés à part dans les récapitulatifs.

    Et en plus de cela, je noterai avec des étoiles et non avec des feus. Pourquoi ? C'est simple, je t'explique. Tout ce que je risque de lire a de très grandes chances d'être vert ou "vert ++". Il n'y a donc aucun intérêt : autant te faire part de ce que j'ai préféré parmi ces livres et de ce que j'ai moins aimé ; surtout si toi aussi, un jour de canicule — ou pas, je ne connais pas tes activités ni tes préférences, tu sais —, l'envie de parcourir l'œuvre de Beckett venait à te prendre, là, comme ça, comme une grippe de joie.

    Si tu ne connais pas Beckett, tu vas sur son Wikipédia, merci, parce que là, vraiment, tu ne peux pas continuer à vivre. Bon, on se retrouve vite pour les premières chroniques. À bientôt !

    Et toi, ça t'a donné envie de lire du Beckett, dis ?

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  • Lecture et contorsion : comment faire ?

    La gymnastique littéraire : voilà une discipline qui gagnerait à être professée. C'est un grand problème pour moi, une évidence, peut-être, pour d'autres, que la position idéale de lecture. Assis, couché, côté droit, côté gauche, debout, les jambes croisées, le dos rond... Celle du sommeil paraît parfois plus simple à trouver !

    Attention, je risque de raconter ma vie dans ce paragraphe. Je lis la plupart du temps chez moi. Sur mon lit, je tiens rarement plus de deux heures, et je change constamment de posture : je passe généralement d'assis à couché sur le côté droit (ceci étant ce que je tiens le mieux) et de couché sur le côté droit à couché sur le côté gauche (ceci étant ce que je tiens le moins). Le soir, donc, cela reste peu concluant, comparé à ce que je peux faire en journée. Dans un fauteuil ou toujours sur mon lit, la lumière du jour doit me donner quelques illuminations, et je tombe parfois sur la perle rare. Il m'arrive de lire dans les transports en commun, ou dans des lieux publics, où je tiens encore mieux : l'environnement, je suppose, m'inspire de rester à tout prix dans ma bulle littéraire... Dans les transports, il y a peu de solutions : c'est assis ou debout. Dans les lieux publics, le mieux reste, selon moi, sur un banc, ou dans l'herbe d'un parc.

    S'il faut parler positions et non environnement — parce que les bruits, les odeurs, jouent également, me semble-t-il, en ce sens qu'ils maintiennent plus ou moins dans cet univers de lecture le "sujet" dont la position démange les plaisirs —, je dirais que cela dépend des personnes. L'on peut se sentir bien dans des positions assez singulières, tandis que d'autres n'en ressortiront qu'avec moult courbatures et maux de tête. L'on peut tenir plus longtemps une position qu'une autre, ou n'avoir aucun problème avec ceci (est-ce que ça t'arrive, toi ?).

    Techniquement, les positions couchées — je parle d'affalement complet — me paraissent confortables mais trompeuses, handicapant la lecture du fait de l'angle de vue, ou la difficulté à tourner les pages à une vitesse satisfaisante. Le tout doit être harmonieux, pour suivre le fil sans se préoccuper de la réalité. La réalité, on ne l'aime pas : elle est moche. Nous lisons pour nous en défaire, alors la position sélectionnée doit impérativement sinon nous la faire oublier, du moins nous en écarter. Les positions assises me conviennent, seulement, à terme, elles m'invitent irrésistiblement à me coucher, à tomber. Sur le ventre, mes bras peuvent tétaniser, mon estomac, écrasé, finit par hurler et — ultime comble — mon cou et mon dos souffrent rapidement. Enfin, je ne lis que très rarement debout. Voici mon avis.

    Mais ce que je pense par-dessus tout, mon intime conviction de lecteur acharné, c'est qu'à la vérité, tout dépend du livre. Un lecteur happé par sa lecture ne se soucie guère de son corps ; une course aux lignes acharnée, plongeant l'intéressé dans une spirale de bonheur, lui fait normalement perdre toutes ses sensations réelles, jusqu'à lui faire omettre qu'il existe en dehors du papier. Pour moi, l'idéal, vous l'aurez compris, est de tomber sur un très bon livre. Malheureusement, ils ne courent pas les rues, et lorsque vous faites des tests réguliers, à ma manière, il faut vous attendre à tomber sur des petits ramassis assez immondes, lents et inintéressants — du moins le pensez-vous, puisque tout n'est qu'affaire de subjectivité, au fond. L'on subit alors les pages, les paragraphes, les mots, et de fait, son petit organisme de rat de bibliothèque...

    Et toi, quelle est ta position préférée pour lire ?

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  • La triste fin du petit Enfant Huître et autres histoires


             

    Titre : La triste fin du petit Enfant Huître et autres histoires

    Auteur : Tim Burton

    Première parution : 1997

    Édition lue : 10/18 (traduit de l'américain par René Belletto — édition bilingue illustrée par Tim Burton)

    SYNOPSIS

     « Fidèle à son univers d'une inventivité si particulière, mêlant cruauté et tendresse, macabre et poésie, Tim Burton donne le jour à une étonnante famille d'enfants solitaires, étranges et différents, exclus de tous et proches de nous, qui ne tarderont pas à nous horrifier et à nous attendrir, à nous émouvoir et à nous faire rire.

    Un livre pour les adultes et pour l'enfant qui est en nous. »

     

    Timothy Walter Burton, dit Tim Burton, est un réalisateur, scénariste et producteur américain né le 25 août 1958 à Burbank en Californie. Maître du fantastique influencé par Edgar Allan Poe, excellent conteur et graphiste d'exception, il a notamment signé la mise en scène de Beetlejuice, Batman, Edward aux mains d’argent, Batman : Le Défi, Ed Wood, Sleepy Hollow, Big Fish, Charlie et la Chocolaterie, Sweeney Todd : Le Diabolique Barbier de Fleet Street, Alice au pays des merveilles ainsi que Dark Shadows.

    « Hélas, elle se sait prisonnière d'un sort, dont elle ne se sort jamais. En effet, dès qu'on s'approche d'elle, les épingles encore plus profond dans son cœur s'enfoncent. »

    C'est donc une sorte de bonus que j'offre cette semaine : un ouvrage un peu particulier, puisqu'il s'agit d'une édition bilingue et illustrée. Tim Burton, ce cinéaste de génie — dont je vénère la filmographie, soit dit en passant —, est également un poète de talent, ce que l'on a tendance à oublier. Les introductions alambiquées, les récits rimés sombres, les chansons (je pense notamment à L'étrange Noël de M. Jack) proviennent de ce même imaginaire noir et burlesque en même temps, enfantin et, dans le fond, pas tellement... On peut aimer ou détester, mais force est de constater qu'il a beaucoup de talent.

    « L'enfant avec des clous dans les globes oculaires
    monta son arbre en métal,
    lequel avait vraiment un drôle d'air
    puisque l'enfant n'y voyait que dalle. »

    Cette édition, simple et un peu décevante graphiquement (heureusement que les dessins de Burton sont là pour remonter le niveau), m'a totalement indifféré. Je m'intéressais, bien entendu, au contenu et seulement au contenu. Je n'ai pas été déçu. Il y a de grands efforts faits sur la traduction, je pense qu'il faut les saluer, parce que c'est très loin d'être simple de retranscrire avec la même voix, la même puissance, le même style, et surtout les mêmes rimes, les mêmes détails techniques tout en conservant le sens exact. Cela reste tout de même bien meilleur en anglais.

    « Mais sa mémoire, à la première marée, se perdit. »

    Des chutes, des fins macabres, des morales horriblement drolatiques, un florilège de clins d'œil au conte et à la société... Des histoires qui se veulent banales mais qui sortent, quoi qu'on puisse en faire, de l'ordinaire. Certaines sont très courtes, mais délicieusement cyniques. Une flopée d'allusions à son univers, à ses films, à ses pensées, à ses projets, peut-être, qui sait ?... On referme pour ouvrir une nouvelle fois et pour rire honteusement de malheurs qui sont des bonheurs déguisés. On joue avec un tas de sentiments en quelques lignes, et c'est très agréable, reposant, comme lecture, du moins était-ce mon impression.

    « Inopportunément, le père Noël offrit à James un nounours,
    ignorant qu'il avait été lacéré par un grizzli un peu plus tôt dans l'an. »

    C'est frais, c'est dark à souhait sans être lourd ni cliché, c'est Tim Burton en lettres de sang.

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  • Cosmétique de l'ennemi


             

    Titre : Cosmétique de l'assassin

    Auteure : Amélie Nothomb

    Première parution : 2001

    Édition lue : Le Livre de Poche

    SYNOPSIS

     « Sans le vouloir, j'avais commis le crime parfait : personne ne m'avait vu venir, à part la victime. La preuve, c'est que je suis toujours en liberté. C'est dans le hall d'un aéroport que tout a commencé. Il savait que ce serait lui. La victime parfaite. Le coupable désigné d'avance. Il lui a suffi de parler. Et d'attendre que le piège se referme. C'est dans le hall d'un aéroport que tout s'est terminé. De toute façon, le hasard n'existe pas. »

     

    Amélie Nothomb est une femme de lettres belge francophone. Ses romans, décrits comme une intertextualité entre la littérature japonaise médiévale et la littérature occidentale, évoquent des thèmes comme le sens de la vie et de la condition humaine, le métier d'écrivain — ils mettent également en scène un personnage de l'écrivain présenté comme autobiographique — ou encore le suicide amoureux. Depuis ses débuts en 1992 elle publie exactement un ouvrage par an.

    « Je ne peux pas vous empêcher de parler, ce n'est pas interdit. Vous ne pouvez pas me forcer à répondre, ce n'est pas obligatoire. »

    Encore un roman présentant principalement des dialogues, ce qui n'est pas sans me rappeler Hygiène de l'assassin ou encore Péplum. Et encore une réussite à mes yeux : j'ai essayé une fois de plus de m'accrocher, de me montrer réticent, d'adopter un regard critique, mais je n'y suis pas arrivé. Le récit m'a embarqué, comme à l'accoutumée, dans les méandres abracadabrantesques qu'Amélie Nothomb se plaît à tisser. On la croirait redondante tandis qu'elle est seulement talentueuse.

    « C'est drôle ce besoin qu'ont les gens d'accuser les autres d'avoir gâché leur existence. Alors qu'ils y parviennent si bien eux-mêmes, sans l'aide de quiconque. »

    Je pense que la citation du dessus pourrait résumer l'ouvrage entier. C'est l'histoire d'une histoire dont on ne peut dire grand-chose sans en révéler la finalité. Une histoire. Seulement. Une histoire qui va bouleverser une personne et la lier inextricablement à une autre. Le tout rondement mené : bref, encore, toujours ; percutant, encore, toujours ; palpitant.

    « On voit tout de suite quand quelqu'un lit. Celui qui lit vraiment n'est pas là. »

    Le dialogue sied tellement à Amélie que je ne saurais formuler la moindre critique à l'encontre de la technique : tout est fait pour entraîner le lecteur, d'humour noir à suspense jusqu'aux chutes, plusieurs. En lisant, vous verrez qu'il y a en effet un certain nombre de chutes (je pense que l'on pourrait même parler de "roman à chutes", et au pluriel, oui). J'ai beaucoup aimé la première et un peu moins la dernière — toujours sans vous en indiquer le nombre —, laquelle annule cette première d'une certaine manière...

    « — Que me demandez-vous, au juste ?
    — De m’écouter.
    — Il y a des psy, pour ça.
    — Pourquoi irais-je chez un psy quand il y a des aéroports pleins de gens désœuvrés tout disposés à m’écouter ? »

    Lu d'une traite : une heure et demie de vertiges et de plaisirs. Une énième réussite de cet écrivain que je recommande fortement.

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